Charcuterie artisanale : le bon goût des choses simples

La Maison Beucher, de Châteaugiron (35), représentera la Bretagne au Concours général agricole à Paris.

Pour la première fois, la Maison Beucher, spécialiste de la charcuterie artisanale en Ille-et-Vilaine, participera au Concours général agricole (CGA) au Salon de l’agriculture de Paris. Et tant qu’à se lancer dans l’aventure, les propriétaires ont inscrit pas moins de six produits à l’expertise du jury : « Saucisse nature, jambon blanc avec couenne, saucisson à l’ail à l’ancienne, pâté breton, rillettes au jambon et pâté de campagne », égraine Julien Beucher qui est à l’initiative de cette candidature.

« Je constate que les médailles attribuées à Paris comptent dans la promotion et le succès des produits. Beaucoup de gens se laissent guider par cette indication à l’heure de choisir une bouteille de vin par exemple. Alors pourquoi ne pas tenter notre chance ? », explique le jeune homme. À ses côtés, son père Bertrand s’excuse presque :  « Si nous avons pris part à beaucoup de concours et remporté des prix à Alençon, à la Ferté-Bernard, à Falaise… Pour Paris, j’étais convaincu que nous n’avions pas le niveau. » Aujourd’hui, il regrette un peu de n’avoir pas fait le pas plus tôt. « Qui ne tente rien n’a rien ! Une bonne note ou un prix, parfois, ça redresse un bossu », concède-t-il.

« Des choses simples mais bien faites »

L’identité de l’enseigne ? « Que des choses simples que nous faisons bien », martèle l’exigeant Bertrand. Lui qui considère « le porc charcutier comme la quintessence même de l’excellent travail de l’éleveur ». La Maison Beucher travaille du cochon conventionnel, local, élevé sur paille avec de la graine de lin dans l’alimentation, acheté à l’abattoir de Saint-Brice-en-Coglès (35). « Outre la viande, ce qu’il y a de breton dans notre charcuterie est le côté rustique. Peu de condiments, juste les basiques comme le sel, le poivre, le persil, le poireau ou l’oignon. Un aspect gros grain des produits. L’utilisation de foie qui apporte une légère amertume. »

« Notre métier, un sacerdoce »

La patte Beucher, c’est surtout une belle histoire de famille qui s’étire et trouve une nouvelle dynamique à chaque génération. « Jules-Marie, mon arrière-grand-père a lancé l’affaire à Châteaugiron en 1895. Il traitait un demi-cochon par semaine. On se demande ce qu’il faisait de l’autre moitié… », s’amuse Bertrand Beucher qui valorise aujourd’hui 80 porcs par semaine. Après avoir suivi les pas de Jules, son grand-père, et Maurice, son père, il vient d’être rejoint par ses enfants Elise et Julien et son gendre François.

« J’imaginais finir en vendant mon affaire et je me retrouve à travailler avec eux. Ce n’est pas facile tous les jours. Mais je suis extrêmement fier. Je les trouve courageux, comme un fils d’agriculteur qui reprend la ferme familiale : ce sont des métiers difficiles, exigeants, qui réclament une présence 365 jours par an. Des activités de production au quotidien compliquées par les normes… Les éleveurs, c’est même pire, car ils travaillent avec du vivant. » Avant d’enfoncer le clou : « Nous aussi, notre métier est un sacerdoce. À 5 h du matin, nous remplissons le camion pour les marchés et même quand il fait -8 °C, nous tenons la boutique. »

Saucisson à l’ail pour les enfants

Quand il a rejoint ses parents en 1982, « le développement des supermarchés fermait partout les petits commerces », se rappelle-t-il. « Mais j’ai cru au produit, à la qualité. » Aujourd’hui, alors que la consommation de viande est régulièrement remise en cause, François, lui, reste enthousiaste : « Même sur le marché du Landrel, au pied des tours du sud de Rennes, où il y a une véritable mixité sociale et culturelle, j’ai une vraie clientèle de jeunes. Des fins gourmets qui cherchent des produits différents de ceux qu’ils trouvent en grande surface. »

Après, le bon goût s’entretient. Un des trucs imparables chez Beucher, « un coup marketing avant l’heure », est de distribuer une tranche de saucisson à l’ail aux enfants, en boutique comme sur les marchés. « Cela fait 100 ans que nous perpétuons la tradition. Tous les salariés y sont attachés, reprend Bertrand. Un geste sympa et une manière de faire aimer les bonnes choses à la future génération de clients… »

Source : Toma Dagorn – Paysan Breton du 23 février 2017 https://www.paysan-breton.fr/2017/02/le-bon-gout-des-choses-simples/